Le nombre d’entrées irrégulières par voie terrestre au Canada a considérablement baissé. Les demandes d’asile se concentrent désormais dans les aéroports.
D’ici la fin septembre, le chemin Roxham va redevenir une route calme et paisible.
Dans les prochains jours, les installations de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) vont être complètement détruites, à coup de pelles mécaniques, selon les informations obtenues par Radio-Canada.
Une page d'histoire se tourne
, confie une source proche du dossier.
Ces infrastructures ont été mises en place dans les dernières années pour juguler le flot de migrants entrant au Canada par cette voie.
Devenu mondialement célèbre à partir de l’été 2017, le chemin Roxham a été la porte d’entrée de près de 110 000 demandeurs d’asile depuis cette période. Au début de ce mouvement, des milliers d’Haïtiens et de Nigérians installés aux États-Unis ont rejoint le nord du continent, par peur des politiques du président Donald Trump.
Au fil des années, les passeurs et transporteurs se sont multipliés et une industrie très lucrative a vu le jour. Comme l’a révélé Enquête l’an passé, des réseaux s’organisaient, depuis la Floride par exemple, pour amener chaque semaine des centaines de migrants vers ce petit chemin séparant l’État de New York et le Québec, à proximité du village de Saint-Bernard-de-Lacolle.
Par la suite, l’origine de ces demandeurs d’asile a évolué. De nombreux Turcs, Colombiens, Congolais, Angolais et Vénézuéliens ont tour à tour traversé plusieurs pays pour arriver jusqu’au chemin Roxham.
Face au nombre grandissant de personnes empruntant cette route, les autorités canadiennes ont agrandi leurs installations. Des abris temporaires sont ainsi devenus permanents, afin de mieux contrôler et accueillir les demandeurs d’asile. Et des policiers provenant d’autres provinces ont aussi été appelés en renfort.
Un nouveau complexe modulaire avait également vu le jour l’automne dernier et plusieurs roulottes de chantier avaient été installées. Des centaines de millions de dollars ont ainsi été dépensés pour recevoir et héberger les demandeurs d’asile provenant du chemin Roxham.
L’attrait de cette route a finalement fondu à la fin de l’hiver. Face à la pression politique de plusieurs partis d’opposition, mais également du gouvernement du Québec, Ottawa a revu ses règles frontalières avec les États-Unis.
Une nouvelle Entente sur les tiers pays sûrs a été annoncée le 24 mars par Joe Biden et Justin Trudeau, rendant impossible pour les migrants provenant des États-Unis de demander l’asile au Canada, qu’importe le point d’entrée.
Record en vue, douaniers débordés
Depuis la mise en place de ce nouvel accord, les entrées au Canada par voie irrégulière ont considérablement baissé. On compte à peine quelques dizaines d’interceptions par les forces de l’ordre, chaque mois, contre plusieurs milliers par le passé.
Mais le nombre total de demandeurs d’asile arrivant au Canada n’a pas diminué, loin de là.
Selon nos informations, les aéroports de Montréal, Toronto et Calgary vivent actuellement une situation exceptionnelle. Une tendance confirmée par l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC).
IRCC est au courant de l’augmentation du nombre de demandes d’asile dans certains aéroports canadiens. Nous continuerons de surveiller les demandes d’asile présentées dans les aéroports.
Mercredi dernier, en une seule journée, près de 200 personnes ont demandé l’asile dès leur arrivée à l’aéroport de Montréal. Une réalité similaire touche les agents douaniers ontariens et albertains.
Tout le monde est débordé
, glisse un fin connaisseur du sujet.
Il y a un manque criant de personnel
, déplore Pierre St-Jacques, porte-parole du Syndicat des douanes et de l'immigration.
Ce dernier critique la mauvaise planification de la part de [l'Agence des services frontaliers] et du gouvernement, qui ne disposent pas des effectifs frontaliers nécessaires
, dans une période où les demandeurs d'asile côtoient, à l'aéroport, les étudiants internationaux et les travailleurs saisonniers.
Selon nous, il manque environ de 2000 à 3000 agents de première ligne partout au pays. Cela ferait certainement toute la différence.
L'ASFC, de son côté, assure ajuster ses effectifs selon les vols prévus à l’horaire afin d’avoir suffisamment de personnel et de limiter le plus possible les temps d’attente à la frontière
.
L’ASFC met tout en œuvre pour qu’il y ait suffisamment de ressources pour répondre aux volumes de la circulation et assurer le bon déroulement des opérations.
Entre janvier et juillet, plus de 69 000 personnes sont venues demander l’asile au Canada, contre près de 45 000 l’an passé, pour la même période. À ce rythme, les records de 2022 devraient ainsi être battus.
Ce phénomène perdure et s’accentue depuis plusieurs mois. Comme l’a dévoilé Radio-Canada, le gouvernement Trudeau a instauré une politique longtemps tenue secrète, visant à réduire l’inventaire de demandes de visa touristique, en allégeant les mesures de vérification.
Cette mesure a rapidement fait grimper en flèche le nombre de demandeurs d’asile provenant par exemple de citoyens africains, qui ont besoin d'un visa pour entrer au Canada. Ces dernières semaines, les personnes venant du Kenya, de la République démocratique du Congo, du Nigeria, du Mexique et de l'Inde sont d'ailleurs les plus nombreuses à demander l'asile, confirme l'ASFC.
Aux yeux d'Immigration Canada, cependant, le pourcentage de personnes arrivant au Canada avec un visa de résident temporaire (VRT) et demandant l'asile reste faible par rapport au volume global de visas de résident temporaire (VRT) que le ministère délivre habituellement chaque année
.