Le gouvernement Trudeau promet une mise à jour économique « ciblée » et « prudente ».
La mise à jour économique qui sera déposée mardi à Ottawa comprendra une mesure pour rendre la location à court terme, de type Airbnb, moins attrayante fiscalement pour certains propriétaires. Le gouvernement engagera aussi des milliards, en prêts et en subventions, pour accélérer la construction de logements.
Après avoir été critiqué par le chef conservateur pour son inaction face à la crise du logement, le gouvernement libéral tente de montrer qu’il prend des mesures concrètes pour s’y attaquer.
Selon les informations obtenues par Radio-Canada, Ottawa a l’intention d’empêcher les propriétaires de faire des déductions fiscales pour des propriétés offertes en location à court terme lorsqu’elles sont situées dans des zones où cette pratique est interdite.
Selon la nouvelle mesure proposée, il leur serait désormais impossible de déduire certaines dépenses de location, par exemple des frais d’intérêt, l’impôt foncier et le coût des réparations. Cette mesure qui nécessitera des changements législatifs doit entrer en vigueur le 1er janvier 2024.
La réglementation sur les propriétés en location à court terme varie beaucoup d’une ville et d’une province à l’autre. Par exemple, à Montréal, plusieurs arrondissements limitent à certaines zones ou interdisent carrément (comme à Verdun) la location commerciale touristique de courte durée. Ainsi, Ottawa veut arrimer ses politiques fiscales avec le cadre imposé par les villes et par les provinces.
Les propriétaires ciblés
La mesure fédérale prévoit aussi de pénaliser les propriétaires délinquants. Ceux qui se trouvent en violation de la réglementation provinciale ou municipale en ce qui concerne la location à court terme se feraient refuser leur demande de déductions fiscales par l’Agence du revenu du Canada (ARC).
Par exemple, au Québec, les propriétaires qui veulent faire de la location de courte durée doivent obligatoirement s’enregistrer auprès des autorités provinciales.
Selon une source gouvernementale, cette approche vise à rendre moins lucratives les propriétés en location à court terme et à décourager les propriétaires qui contreviennent aux règles. L’idée consiste à changer l’équation pour les propriétaires
, explique cette source.
La mise à jour comprendra aussi de l’argent pour les municipalités afin de les aider à faire respecter leurs règles qui encadrent la location à court terme.
Le gouvernement espère que sa proposition incitera plus de villes à encadrer la location à court terme, ce qui permettrait d’atténuer la pénurie de logements sur le marché locatif à long terme.
Statistique Canada estime que les revenus du marché de l’hébergement privé à court terme au Canada se sont élevés à 2,8 milliards de dollars en 2018.
Des milliards pour la construction de logements
Selon des informations de CBC, la mise à jour économique prévoit aussi un montant de 15 milliards de dollars pour l’octroi de prêts, d’une durée de 10 ans et à des conditions avantageuses, qui serviront à la construction de nouveaux logements locatifs.
La Société canadienne d’hypothèques et de logement sera responsable d’administrer le tout auprès des constructeurs.
Toujours selon CBC, Ottawa créera aussi un fonds d’un milliard de dollars pour financer la construction de logements sociaux à but non lucratif sous forme de subventions.
Selon la source gouvernementale consultée par Radio-Canada, la stratégie gouvernementale pour s’attaquer à la crise du logement compte deux volets : débloquer le parc immobilier sous-utilisé au pays et accélérer la construction résidentielle.
En septembre, le gouvernement Trudeau a justement annoncé qu’il allait exempter de la TPS la construction de nouveaux logements locatifs.
Pour contrer l’augmentation du coût de la vie, la mise à jour économique devrait aussi comprendre des changements supplémentaires en matière de concurrence qui devraient avoir un impact sur le secteur de l’alimentation. Cela figure parmi les demandes du Nouveau Parti démocratique à Ottawa.
Le gouvernement a déposé le projet de loi C-56 en septembre afin de donner plus de pouvoirs au Bureau de la concurrence pour lui permettre, notamment, d'enquêter sur les industries qui se livrent à une concurrence déloyale, par exemple dans les cas de fixation ou de hausse abusive des prix. Selon nos informations, la mise à jour économique devrait proposer des additions complémentaires qui vont au-delà de ce que contient C-56.
On doit faire des choix
Alors que les Canadiens sont forcés de se serrer la ceinture à cause de l’inflation et des taux d’intérêt élevés, le gouvernement fédéral a l’intention de faire preuve de responsabilité budgétaire
, assure notre source. L’exercice sera ciblé
et prudent
.
On doit faire des choix. Nous ne sommes plus dans le creux de la pandémie
, explique-t-elle. Ce n'est pas comme un minibudget
, fait valoir cette source, question de modérer les attentes.
La capacité de dépenser du gouvernement fédéral n'est pas infinie.
Le chef conservateur Pierre Poilievre accuse les libéraux de dépenser sans compter et d’avoir contribué à l’inflation avec des déficits inflationnistes
. Le dernier budget fédéral ne comportait pas de plan de retour à l’équilibre budgétaire. Le mois dernier, le directeur parlementaire du budget a prévu que le déficit fédéral atteindra 46,5 milliards de dollars en 2023-2024, en hausse par rapport à l'estimation de 38,7 milliards de dollars pour 2022-2023.
Le gouvernement Trudeau a d’ailleurs demandé à ses divers ministères de trouver 15 milliards de dollars en économies. Le grand patron des Forces armées canadiennes s’inquiète d’ailleurs de l’impact que ces restrictions pourraient avoir sur le degré de préparation de son organisation.
Cependant, le gouvernement Trudeau maintient qu’il faut tenir compte de la réalité économique dans les choix qui seront faits mardi. Les économistes du secteur privé pointent vers une croissance plus lente ainsi que vers des taux d’intérêt plus élevés et plus longtemps. Tout ça a un impact sur la manière dont on fait nos choix
, explique notre source gouvernementale.