Négociations des conventions collectives, gestion des fonds publics à la Ville de Montréal, subvention pour attirer les Kings de Los Angeles à Québec, augmentation des salaires des députés… À l’heure où les contribuables doivent se serrer la ceinture, les dépenses des divers paliers de gouvernement attirent l'attention. Trois porte-parole de l’opposition en matière de finances ont débattu sur ce sujet à l’émission Les faits d’abord. Un représentant de la CAQ a décliné l'invitation de Radio-Canada.
Gestion chaotique
Le 7 novembre, le ministre des Finances, Eric Girard, a annoncé une fin d'année financière difficile
lors de sa mise à jour économique, mais pour Monsef Derraji (député du Parti libéral), Pascal Paradis (député du Parti québécois) et Haroun Bouazzi (député de Québec solidaire), le gouvernement québécois a plutôt pris, au cours des dernières années, de mauvaises décisions budgétaires, financières et fiscales pour en arriver là.
Le député libéral Monsef Derraji a par exemple critiqué l'idée du gouvernement de donner 500 $ à tous les Québécois qui ont eu un revenu annuel net inférieur à 100 000 $ en 2022. Le gouvernement dit aujourd'hui que les coffres de l'État sont vides et que les provisions restantes sont de 500 millions de dollars, mais c'est ce gouvernement qui a dilapidé les fonds publics
, a dit M. Derraji, qui a ajouté que la CAQ avait hérité d'un surplus de 7 milliards de dollars du gouvernement précédent.
Il y a eu une gestion chaotique des finances publiques par la CAQ.
L'augmentation des salaires des députés de l'Assemblée nationale, adoptée en juin 2023, a également été critiquée par Haroun Bouazzi. Augmenter de 30 % sur un an, alors que [présentement le gouvernement] propose une augmentation de 9 à 11 % pour les fonctionnaires sur cinq ans [...], c'est inacceptable
, a fait valoir le député solidaire en faisant allusion aux négociations entre la CAQ et le Front commun.
Plus on a d'argent, plus on est privilégié
À l'heure où le financement du projet de tramway à Québec et des 10 sociétés de transport de la province est menacé, le gouvernement n'hésite pas à injecter des milliards de dollars lorsqu'il s'agit de multinationales, a pour sa part déploré le député péquiste de Jean-Talon, Pascal Paradis.
C'est une question de priorité. Quand ce sont des multinationales, c'est la valse des milliards
, a-t-il dit constater en donnant l'exemple des subventions accordées à l'entreprise suédoise Northvolt pour qu'elle s'installe au Québec.
Quand il s'agit des plus vulnérables, des banques alimentaires ou des organismes communautaires, il est difficile d'avoir l'oreille de ce gouvernement.
Donner des milliards pour les entreprises privées, c'est un choix. Et je parle des grandes entreprises multinationales, pas des PME
, a-t-il précisé.
M. Paradis a également mentionné au passage la subvention gouvernementale controversée de 5 à 7 millions pour la venue des Kings de Los Angeles à Québec, qu'il a qualifiée de gestion imprudente
.
Quant au député solidaire, il a critiqué la décision de la CAQ de baisser les impôts, qu'il a qualifiée d'injuste
et d'amput[ation de] notre richesse de 1,7 milliard de dollars
. Les 30 % des gens les moins nantis n'en bénéficient pas, car ils sont trop pauvres pour payer des impôts
, a-t-il expliqué.
M. Bouazzi a également tenu à souligner le laxisme concernant les paradis fiscaux, tant par le gouvernement provincial que par le gouvernement fédéral.
Il a notamment cité le rapport publié au début novembre par l'Institut de recherche et d'informations socioéconomiques (IRIS) qui révèle qu'en 10 ans, 59 entreprises canadiennes, dont 33 ont leur siège social au Québec, ont transféré 119,8 milliards de dollars de bénéfices nets au Luxembourg.
Il y a une complaisance par rapport à cet argent [qui se retrouve dans les paradis fiscaux]. Ces entreprises reçoivent toutes de l'argent public. Si elles ne paient pas leur juste part, cela appauvrit les Québécois.
Repenser la fiscalité pour les villes
M. Bouazzi a par ailleurs critiqué la taxe foncière – principal revenu des municipalités –, qu'il considère comme une taxe sur le capital. C'est une taxe d'une injustice incroyable. Elle pèse sur les classes moyennes
, a-t-il déploré.
Pascal Paradis a abondé dans ce sens, ajoutant que le financement des municipalités implique un problème structurel plus large
.
Le problème, c'est que les responsabilités des municipalités augmentent, notamment en matière de lutte contre les changements climatiques, donc leurs revenus ne sont pas adéquats
, pense le député péquiste.
Il a toutefois tenu à saluer le pacte fiscal conclu au début du mois, qui promet l’engagement du gouvernement à inscrire dans la loi le partage, avec les municipalités, d'un montant annuel équivalent à la croissance des revenus générés par un point de la TVQ.