Un article écrit par Francis Plourde

Le rapport du GIEC remet en question le gaz naturel liquéfié en Colombie-Britannique

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La Colombie-Britannique est à l'avant-scène des changements climatiques au pays. En 2021, la province a été frappée par des feux de forêt, des inondations et un dôme de chaleur mortel. Cliquez ici pour afficher l'image d'en-tête
La Colombie-Britannique est à l'avant-scène des changements climatiques au pays. En 2021, la province a été frappée par des feux de forêt, des inondations et un dôme de chaleur mortel.

Le dernier rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) dévoilé lundi rappelle une fois de plus l’urgence d’agir d’ici 2030 pour limiter l’augmentation de la température mondiale. En Colombie-Britannique, il remet aussi en question le projet Cedar LNG, qui a obtenu son certificat d’approbation environnementale la semaine dernière.

Cedar LNG, à Kitimat, doit permettre d'acheminer du gaz naturel liquéfié (GNL) vers les marchés de l’Asie-Pacifique. L'usine de 3,8 milliards de dollars permettra de créer environ 500 emplois lors des travaux, puis 100 emplois permanents quand l’usine sera fonctionnelle.

Selon de nombreuses voix, le rapport du GIEC est un signe que le feu vert accordé à Cedar LNG est une erreur du gouvernement provincial.

Le GIEC est très clair : on ne devrait plus bâtir de nouveaux projets, souligne l’économiste Tom Green, de la Fondation David Suzuki.

Ce [rapport] devrait être une prise de conscience pour le gouvernement, croit aussi Jens Wieting, directeur des campagnes pour les forêts et le climat à Sierra Club BC. Le temps nous manque et il nous faut arrêter de bâtir des projets d’énergie fossile. Ces projets font en sorte qu’il est impossible d’atteindre nos objectifs.

La Colombie-Britannique est l'une des régions canadiennes les plus affectées par les changements climatiques. En 2021, la province a connu à la fois un dôme de chaleur, des feux de forêt qui ont décimé le village de Lytton et des inondations dans la vallée du Fraser.

Un réchauffement de 2 degrés Celsius à l’échelle mondiale se traduit par un réchauffement de 4 degrés en Colombie-Britannique, souligne le directeur du Pacific Climate Impacts Consortium (PCIC), Francis Zwiers.

À supposer qu'une augmentation de 3 degrés Celsius à l’échelle mondiale – le scénario anticipé par le GIEC si la tendance actuelle se poursuit – se produise, les conséquences pourraient être désastreuses, avec la fonte rapide des glaciers et l’augmentation du niveau des océans.

Ces dernières années, Victoria a obtenu l’approbation de nombreux analystes pour son plan d’action sur le climat, qui vise à réduire les émissions de la province de 80 % d’ici 2050.

Selon le dernier rapport du GIEC, il faudrait toutefois plutôt viser une réduction de 84 % à la même date pour espérer limiter l’augmentation de la température à 1,5 degré Celsius d’ici la fin du siècle.

Néanmoins, la province s’est aussi attiré les foudres de militants en raison de son refus de fermer la porte à de grands projets de GNL et de mettre fin à certaines subventions pour l’énergie fossile.

L’approbation de Cedar LNG, la semaine dernière, s’inscrit dans cette tendance.

C’est déjà un problème que nos objectifs ne soient pas assez ambitieux. Ce qui est encore plus inquiétant, c’est que le dernier rapport d’imputabilité montre qu’on n’atteindra pas nos objectifs pour 2025 et 2030. Avec les nouveaux projets d’énergie fossile, ce sera impossible à atteindre.

Jens Wieting, directeur de campagne à Sierra Club BC.

D’ici 2030, le projet est censé devenir carboneutre et dépendre d’énergie hydroélectrique pour la liquéfaction du gaz, un argument qui ne convainc pas l’économiste Tom Green, qui accuse les entreprises gazières et pétrolières d’écoblanchiment.

Même s’il y a des baisses d’émissions en comparaison avec d’autres usines de GNL, le problème, c’est qu’en Asie, quand il arrive, on va le brûler, et cela va accélérer le changement climatique, dit-il. Ce n’est pas du développement économique, c’est hypothéquer notre futur.

Le temps est à l’action, dit Andrew Weaver

D’autres, comme le scientifique Andrew Weaver, de l’Université de Victoria, se montrent plus réservés : Je crois que ce serait temps d’arrêter ces rapports du GIEC. C’est le temps de travailler sur des solutions.

L’ex-politicien, lui-même coauteur de rapports précédents du GIEC, s’était lancé en politique en 2013 afin de faire bouger les choses.

Dix ans plus tard, il porte un regard plus nuancé sur les débats actuels. Comme d’autres, l’ancien chef du Parti vert de Colombie-Britannique s’oppose au projet de Cedar LNG.

L’annonce – le même jour que l’approbation du projet – de nouvelles normes pour les projets de combustibles fossiles lui donne toutefois espoir.

En aucun cas un nouveau projet de GNL n’ira de l’avant si l’on garde ces nouvelles normes en place, dit-il. J’attendrai donc avant de porter un jugement.

Victoria réagit au rapport du GIEC

Dans un courriel envoyé en fin de journée, un porte-parole du ministère de l’Environnement et de la Stratégie sur les changements climatiques a réagi aux nouvelles recommandations du GIEC.

C'est exactement ce que fait notre gouvernement : nous investissons pour nous adapter au changement climatique et prévenir, atténuer et récupérer des catastrophes alimentées par le climat, écrit-il.

La province indique que sa feuille de route sur le climat est flexible et pourrait faire l’objet de révisions.

Il reste du travail à faire, mais nous avons fait des progrès substantiels et nous allons continuer à renforcer ce plan avec le temps pour nous assurer de respecter nos engagements.