Un article écrit par David Rémillard

Protection du caribou : une annonce mardi en Gaspésie

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Le ministre de l'Environnement, Benoit Charette, doit se rendre en Gaspésie mardi afin d'annoncer des mesures de protection du caribou montagnard. (Photo d'archives)Cliquez ici pour afficher l'image d'en-tête
Le ministre de l'Environnement, Benoit Charette, doit se rendre en Gaspésie mardi afin d'annoncer des mesures de protection du caribou montagnard. (Photo d'archives)

De nouvelles mesures de protection des habitats du caribou montagnard de la Gaspésie et du caribou forestier de Charlevoix seront annoncées mardi par le gouvernement du Québec, un premier pas après des années de tergiversations au sujet de ces espèces menacées.

Le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Benoit Charette, doit se rendre en Gaspésie mardi prochain pour procéder à ces annonces. Il sera accompagné de la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina.

Obtenue de plusieurs sources distinctes, cette information a été confirmée par le cabinet de M. Charette vendredi après-midi. Ce dernier a refusé de commenter davantage.

Projets pilotes à défaut d'une stratégie

Tel que rapporté cette semaine par Radio-Canada, le gouvernement Legault ira officiellement de l'avant avec deux projets pilotes. C'est donc dire que le conseil des ministres a finalement approuvé mercredi certaines mesures concoctées par les équipes des deux ministères concernés.

Québec ne déposera pas, pour le moment, de stratégie globale pour ses 13 hardes, promise depuis plus de cinq ans. Selon nos informations, la province veut d'abord mesurer la réception des mesures qui seront mises en œuvre dans le cadre des projets pilotes.

Seuls les troupeaux de Charlevoix et de la Gaspésie seront ciblés lors de cette première étape.

Pour les autres populations de caribous forestiers, le gouvernement provincial devrait maintenir l'ensemble des mesures intérimaires actuellement en vigueur. Dans plusieurs régions, des moratoires sur la récolte forestière sont imposés en attendant le dépôt de la stratégie complète.

Modifications réglementaires

Les nouvelles mesures seront réservées à deux hardes en situation de précarité extrême et dont les habitats sont hautement perturbés par les activités humaines. Parmi les mesures qui seront annoncées, Québec devrait notamment dévoiler des zones d'habitat en restauration.

Ces habitats sont définis comme des territoires perturbés [...] qui sont fréquentés par le caribou mais dont les conditions actuelles [...] sont jugées insuffisantes pour assurer le maintien ou la croissance des populations, peut-on lire dans la documentation gouvernementale. L'objectif est de favoriser leur restauration pour qu'ils redeviennent propices au caribou.

Les nouvelles mesures supposent des modifications au Règlement sur les habitats fauniques, qui encadre les usages permis ou non dans l'habitat d'une espèce menacée ou vulnérable. L'industrie forestière, l'industrie minière et le secteur récréotourisque, notamment, pourraient ainsi être touchés.

Au bord du gouffre

Les caribous sélectionnés pour les projets pilotes se trouvent au bord du gouffre et font déjà l'objet de mesures de conservation extrêmes. Dans les deux cas, des programmes intensifs de contrôle des prédateurs sont en vigueur. Québec tente aussi d'accélérer la fermeture de chemins forestiers dans leurs aires de répartition respectives.

La harde de caribous montagnards de la Gaspésie représente un écotype distinct des autres hardes de caribous forestiers. Sa situation est si précaire que Québec capture des femelles depuis deux hivers afin de les mettre en enclos de maternité, histoire de les protéger des prédateurs lors de la mise bas du printemps.

Dans Charlevoix, l'ensemble de la harde de caribous forestiers vit en enclos depuis l'hiver 2022, dans le parc national des Grands-Jardins. Après 11 naissances l'an dernier, le cheptel a atteint 31 individus, un sommet depuis un creux historique de 16 bêtes, il y a deux ans.

Outre ces deux hardes, le troupeau de Val-d'Or vit aussi en enclos depuis quelques années. Sur la Côte-Nord, la population du réservoir Pipmuacan suscite l'inquiétude et pourrait devenir la prochaine à atteindre le seuil critique. Là-bas, les Innus de Pessamit proposent l'aménagement d'une vaste aire protégée et attendent toujours sa création, promise par Benoit Charette.

À l'échelle provinciale, il ne resterait actuellement qu'un peu plus de 5000 caribous forestiers ou montagnards. Les populations, de façon générale, montrent des signes de déclin depuis plusieurs années. Selon le ministère de la Faune, la destruction de leur habitat, principalement par les coupes forestières, figure en tête des facteurs qui ont contribué à ce déclin.

Pas d'échéancier pour la suite

Québec ne fixe pour le moment aucune date limite pour terminer son travail d'élaboration de la stratégie complète. Cette dernière devait être rendue publique lors du premier mandat de la Coalition avenir Québec (CAQ), sous la responsabilité de l'ex-ministre Pierre Dufour.

Depuis trois ans, le gouvernement fédéral menace de se mêler du dossier. Le ministre de l'Environnement, Steven Guilbeault, a enclenché des démarches auprès du conseil des ministres pour l'imposition de décrets au Québec.

En vertu de la Loi sur les espèces en péril au Canada, M. Guilbeault est légalement tenu d'intervenir si des espèces qui y sont assujetties, comme le caribou, sont en danger de par l'insuffisance ou de par l'absence de mesures de protection des provinces ou des territoires.

Les ministres Guilbeault et Charette ont échangé à propos du dossier du caribou lundi dernier, en marge du sommet sur la pollution par le plastique, à Ottawa.