Un article écrit par Evelyne Asselin

Début des audiences à la Cour suprême sur la « loi antipipeline »

Justice et faits divers > Industrie pétrolière

La Cour suprême entendra les argumentaires pour et contre la Loi sur l'évaluation d'impacts du 21 au 22 mars.Cliquez ici pour afficher l'image d'en-tête
La Cour suprême entendra les argumentaires pour et contre la Loi sur l'évaluation d'impacts du 21 au 22 mars.

Sept des neuf juges de la Cour suprême du Canada ont commencé à entendre les arguments en soutien à la Loi sur l'évaluation d’impact mardi, une loi instaurée par le gouvernement fédéral en 2019 surnommée la loi « antipipeline » par ses opposants.

Le gouvernement de l'Alberta avait saisi les tribunaux lors du dépôt du projet de loi, nommé alors C-69, pour le faire invalider, jugeant cette loi inconstitutionnelle. La Cour d’appel de l’Alberta leur a donné raison en mai 2022 par un vote de 4 contre 1.

Ces audiences devant la Cour suprême sont la dernière occasion pour le gouvernement fédéral de défendre sa loi qui vise à donner plus de place à l'évaluation de l'impact environnemental dans l'approbation d'un projet de développement d’envergure comme une mine de sable bitumineux ou la construction d’un pipeline.

Les questions des juges en cette première journée de plaidoiries tournaient autour de ce qui est la principale plainte des provinces : est-ce que la loi donne un droit de véto à Ottawa sur tout projet de développement?

Les juges cherchaient au fond à savoir par leurs questions dans quelle mesure le gouvernement fédéral peut évaluer des projets, de grands projets ou de gros projets qui posent des risques environnementaux, et puis quel type de projet il peut évaluer et quel type de projet il ne pourrait pas évaluer, explique maître David Robitaille, représentant légal pour le Centre québécois du droit de l’environnement, l’un des intervenants en faveur de la loi lors des audiences de mardi.

Le procureur général du Canada, ainsi que plusieurs groupes environnementaux, ont fait valoir que la loi est constitutionnelle parce qu’elle contient des seuils précis qu’un projet doit atteindre pour être évalué par ce processus.

Ils ont invité les juges à considérer la constitutionnalité de la loi elle-même et non de son application éventuelle.

La loi est ce que l’on appelle en droit une loi d’application générale, c’est-à-dire que c’est une loi qui peut s’appliquer à n’importe quel projet, renchérit David Robitaille.

L’évaluation en tant que telle, ça n’impose pas de conditions, ça n’empêche pas les provinces d’exercer leurs compétences. Par contre, à la fin quand le gouvernement fédéral voudra imposer des conditions, il faudra voir l’effet que ces conditions ont sur des projets de compétences provinciales et vice-versa.

David Robitaille, professeur de droit constitutionnel à l’Université d’Ottawa et représentant légal pour le Centre québécois du droit de l’environnement.

Deux juges absents

Seuls sept des neuf juges de la Cour suprême siègent pour ces audiences sur la constitutionnalité de la loi d'évaluation d'impact qui se tiennent sur deux jours.

Le juge Russell Brown est absent à cause d'un incident dans lequel il est impliqué aux États-Unis.

La première juge autochtone à être nommée à la Cour suprême, Michelle O'Bonsawin, a été retirée de la cause pour éviter une décision nulle à la fin des procédures.

En conférence de presse mardi, la première ministre de l’Alberta s’est dite inquiète de l’absence du juge Russell Brown puisque celui-ci est une voix minoritaire sur la taxe sur le carbone et à défendre les droits des provinces.

Nous allons laisser les procédures suivre leur cours. Nous pensons toutefois que cette loi est une réécriture de notre constitution, surtout dans un contexte où un tribunal inférieur a jugé [en sa défaveur] à 4 contre 1.

Danielle Smith, première ministre de l’Alberta.

Les procureurs de l’Alberta et de sept autres provinces prendront la parole mercredi lors de la continuation des audiences.