La ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron, refuse de reconnaître et de nommer l'intersectionnalité en plus de se « refermer » lorsqu'il est question de mesures concrètes pour les femmes.
C'est le constat que dresse le Collectif 8 mars, qui comprend notamment 17 tables régionales de concertation en condition féminine. Ses membres sont sorties déçues de leur rencontre d'une heure avec Mme Biron jeudi dernier.
Dans un communiqué, le Collectif s'est désolé du ton
de la ministre, peu propice à des échanges constructifs pour améliorer les conditions de vie de toutes les femmes
.
Au contraire, la rencontre a été tout à fait constructive
, rétorque la ministre. Les échanges ont notamment porté sur la qualité des services publics, sur le droit au logement et sur la discrimination dans le marché du travail.
La rencontre avec le Collectif 8 mars a été l'occasion pour moi de prendre connaissance de leurs revendications sur de nombreux sujets. Nous avons un objectif commun : l'égalité entre les hommes et les femmes. C'est en ralliant toutes les féministes du Québec que nous y parviendrons.
Intersectionnalité : grand malaise
En ce qui concerne l'intersectionnalité (c'est-à-dire la discrimination croisée), le collectif dit avoir perçu un grand malaise
chez la ministre Biron.
La ministre n'a jamais nommé le mot
, a dit déplorer en entrevue la co-porte-parole du collectif, Karine Drolet. Elle dit que les femmes vivent différentes situations [...] mais ne nomme pas intersectionnalité.
L'intersectionnalité fait généralement référence aux recoupements entre différents systèmes de discrimination. On peut ainsi penser aux femmes immigrantes, autochtones, aînées, handicapées et/ou en situation de pauvreté.
Québec solidaire (QS) a souligné en Chambre la semaine dernière que le mot intersectionnalité
apparaît pourtant dans plusieurs documents officiels gouvernementaux.
Cette notion est partie intégrante, par exemple, de la stratégie gouvernementale 2022-2027 pour contrer la violence sexuelle et la violence conjugale au Québec.
Les recoupements entre différents systèmes de discrimination placent certaines femmes dans des contextes de vulnérabilité accrue par rapport à la violence sexuelle et à la violence conjugale
, lit-on dans cette stratégie.
Mme Drolet fait le parallèle avec le racisme systémique, que le gouvernement Legault refuse de nommer.
C'est certain que le fait de le reconnaître et de le nommer, ça va en quelque sorte obliger le gouvernement à aller vers des actions qui sont en lien avec ce qu'il affirme
, analyse-t-elle.
On sent qu'il y a un grand malaise de la ministre [pour ce qui est de] sa réponse face à [l'intersectionnalité]. On sent que ça ne vient pas nécessairement juste d'elle, mais c'est un enjeu du gouvernement au complet et du premier ministre.
Le concept d'intersectionnalité a suscité un débat à la fin du mois de février à l'Assemblée nationale.
QS avait déposé une motion au Salon bleu qui encourageait l'analyse différenciée selon les sexes dans une perspective intersectionnelle afin de défendre les droits de toutes les femmes au Québec
.
Le parti avait l'appui du Parti libéral et du Parti québécois mais pas celui de la Coalition avenir Québec.
Mme Drolet se réjouit qu'on parle d'intersectionnalité; elle promet que le Collectif ne lâchera pas le morceau
et va continuer de taper sur le clou
.
Le Collectif souhaite également que le Secrétariat à la condition féminine, dont est responsable Mme Biron, devienne un ministère, ce qui donnerait plus de poids
à la ministre autour de la table du Conseil des ministres.