Un article écrit par Radio-Canada

Danièle Sauvageau est déçue de l’inaction de la Ligue canadienne de hockey

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Danièle Sauvageau

La Commission sur les allégations de violence dans le hockey junior a présenté mercredi le témoignage de l’ancienne entraîneuse Danièle Sauvageau et de l’ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick Camille Thériault.

Danièle Sauvageau, aujourd'hui professeure associée au Département de gestion de HEC Montréal, a coécrit avec Camille Thériault et Sheldon Kennedy, ancien joueur de la LNH (Détroit, Calgary, Boston), un rapport sur la violence dans toutes les ligues canadiennes juniors dans un comité d'examen indépendant mis sur pied le 20 juillet 2020.

Le rapport a été remis à la Ligue canadienne de hockey (LCH) le 5 novembre 2020, et ce n'est qu'en janvier 2022 que la ligue a été forcée de le rendre public, après avoir exigé des trois coauteurs le respect d'une clause de confidentialité.

Dans ce document, le comité dit avoir constaté qu’il existe effectivement des comportements répréhensibles en dehors de la glace dans la LCH, et que la culture systémique qui règne au sein de la ligue a fait en sorte que ces comportements sont devenus une norme culturelle.

La loi du silence qui entoure la maltraitance favorise sa perpétuation, est-il écrit dans le rapport, qui fait 13 recommandations à la ligue.

Mercredi, Camille Thériault et Danièle Sauvageau disent avoir été déçus de l'attitude de la LCH quand ils ont présenté leurs recommandations le 5 novembre 2020.

Aucune question ne nous a été posée lorsqu'on a fait la présentation. On a été surpris par le manque d’intérêt. Un propriétaire a dit : "Nous avons beaucoup de travail à faire", a mentionné Camille Thériault.

Notre rôle était non seulement d'identifier les problèmes, mais de préparer un plan d'action, a ajouté l'ancien premier ministre. Il fallait qu'on arrête de débattre s'il y a des problèmes de maltraitance dans le hockey junior. Il y en a.

La déception a été la non-urgence de la ligue de montrer le travail qui avait été fait, a admis Camille Thériault.

Un sentiment partagé par l'ancienne entraîneuse de l'équipe canadienne, championne olympique en 2002.

J’ai été très déçue, car 14 mois, c’est très long. Nous étions en pleine pandémie, et la LCH avait le temps d’étudier notre rapport, a dit Danièle Sauvageau.

L’ancien hockeyeur Enrico Ciccone, aujourd’hui député de Marquette pour le Parti libéral du Québec, a ensuite expliqué que la LCH a commandé un autre rapport, fait par des avocats, dans lequel le rapport du comité de Danièle Sauvageau, Camille Thériault et Sheldon Kennedy est devenu un onglet.

L'ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick a rappelé que les trois membres du comité ne pouvaient pas en parler publiquement.

Nous avions signé une entente de confidentialité en pensant que la LCH allait rendre le rapport public, a-t-il dit.

Ne pas aborder les agressions

Répondant à Enrico Ciccone, Danièle Sauvageau a révélé devant la commission parlementaire que la LCH avait balisé le travail du comité, en lui imposant de ne pas s’intéresser aux agressions sexuelles et physiques.

Oui, c’est exact, a-t-elle simplement répondu.

Mme Sauvageau a ensuite précisé que le comité a pris la peine d’engager un avocat pour s’assurer que le comité ne déborde pas de son mandat.

On aurait souhaité aller plus loin. Beaucoup de gens nous ont parlé, près de 700 personnes, et on aurait pu explorer d’autres pistes. On avait un ensemble de questions à poser. La ligue a voulu voir les questions, on a dit non. On voulait garder le caractère indépendant de notre comité, a-t-elle affirmé.

L’intimidation peut amener à des débordements, et le rapport aurait répondu à ces questions-là si on nous en avait donné le mandat, a-t-elle ajouté.

Alors, pourquoi avoir accepté ce mandat compte tenu de ces balises? a demandé le député de Rosemont pour Québec solidaire, Vincent Marissal.

On veut servir notre sport. Et avec les recommandations de notre rapport, on veut croire qu’on peut améliorer notre sport, a mentionné Danièle Sauvageau.

C’est pour donner une lueur d’espoir, a ajouté Camille Thériault.

Sur la loi du silence dans le monde du hockey, sur la fidélité au club, des valeurs inculquées dès le plus jeune âge, Danièle Sauvageau a répondu clairement à Enrico Ciccone.

Les comportements positifs peuvent rester dans le vestiaire, mais le code de vie dépasse le cadre du vestiaire.

Danièle Sauvageau

Il faut demander aux joueurs de se rappeler les comportements acceptables, a insisté Danièle Sauvageau. Et ces comportements doivent sortir du vestiaire et se retrouver sur la patinoire et à l'extérieur.

Selon Danièle Sauvageau, il faut poursuivre le combat, surtout quand il est question d’abus.

Il faut marquer le temps, garder le cap, a-t-elle répété plusieurs fois durant la discussion de 60 minutes. Lorsque personne n'est responsable, certaines choses passent. Les dirigeants sont imputables. Quand on est en charge d'une ligue, on doit s'assurer de la mise en place des programmes de formation et des mécanismes de suivi.

On a travaillé sur ce rapport pour tenter de régler les problèmes. Il faut s’assurer que les programmes d’éducation donnent confiance aux gens de dire : "ça, c’est non". Les intervenants autour doivent avoir le radar très aiguisé pour pouvoir agir rapidement, en temps réel, et de rapporter si le changement n’est pas appliqué, a-t-elle conclu.